Yahoo / Microsoft : comment tout un pan du Web se joue au poker menteur
Enième rebondissement de la saga Microsoft / Yahoo qui agite le secteur depuis début février : le portail Internet a repris langue avec Time Warner / AOL, sous l’oeil complice de Google, pour repousser la proposition de Microsoft. Lequel discute avec News Corp – qui a renoncé à venir au secours de Yahoo il y a quelques semaines – pour une nouvelle offensive cette fois commune.
Enième rebondissement de la saga Microsoft / Yahoo qui agite le secteur depuis début février : le portail Internet a repris langue avec Time Warner / AOL, sous l’oeil complice de Google, pour repousser la proposition de Microsoft. Lequel discute avec News Corp – qui a renoncé à venir au secours de Yahoo il y a quelques semaines – pour une nouvelle offensive cette fois commune.
Pour tous, les enjeux sont les mêmes : contrôler le maximum d’audience via contenus et services de recherche ou d’applications hébergées (SaaS, Software as a service) pour s’octroyer la plus grosse part du gâteau publicitaire ; se doter des équipes et technologies les plus performantes ; contrer l’émergence des nouveaux acteurs que sont les réseaux sociaux sans prendre trop de risques dans un secteur où le modèle économique n’est pas encore éprouvé.
Les montages possibles
C’est le Wall Street Journal qui a dévoilé les dernières tractations, de « sources proches des différents dossiers ». Des fuites suffisamment bien documentées et organisées pour ne pas penser à un immense poker menteur dans lequel la communication par médias interposés a un rôle central à jouer.
Sur la table désormais, deux dossiers. Celui a les faveurs de la direction de Yahoo – et surtout celle de Jerry Yang son fondateur – repose sur un soutien fort, mais indirect, de Google et sur un rapprochement avec AOL – propriété de Time Warner. Déjà évoqué il y a quelques semaines, le projet ressort en réponse à l’ultimatum menaçant de Steve Ballmer qui donne trois semaines à Yahoo avant de se lancer dans une offensive hostile contre le portail. Il s’agirait d’une reprise d’AOL par Yahoo contre 20% de la nouvelle entité à Time Warner et un accompagnement financier de ce dernier. Par ailleurs, cet équipage signerait un partenariat fort avec Google – détenteur de 5% du capital AOL - qui pourrait distribuer ses liens publicitaires contextuels sur le réseau Yahoo/AOL. A la clef une optimisation des revenus pour le portail.
Histoire de donner corps à cette solution, Yahoo et Google sont convenus de tester le dispositif et l’offre durant 15 jours à compter de la semaine prochaine et sur 3% du trafic généré par les recherches sur Yahoo Search… Reste que les autorités chargées de protéger la concurrence pourraient fortement tousser vu la puissance commerciale potentiellement dégagée par l'alliance. Microsoft ne s’y est pas trompé et a tout de suite réagi en évoquant une pratique « anti-concurrentielle ». Un corpus législatif que l’éditeur de Windows connaît sur le bout des doigts !
Autre dossier, Microsoft – outre donc son offre directe – viendrait, toujours selon le quotidien économique, de prendre langue avec News Corp (propriétaire du Wall Street Journal), le groupe média du tycoon australien Rupert Murdoch. News Corp avait déjà été pressenti comme repreneur de Yahoo. Mais c'était en solo et pour contrer l'éditeur de Windows ! Murdoch avait vite jeté l’éponge.
Il s’agirait avec Microsoft d’un attelage redoutable. L'éditeur de Windows et News Corp pourraient se retrouver co-actionnaires d’une société regroupant MSN, Yahoo et MySpace. Ce dernier – l’un des principaux outils de réseaux sociaux – a été acquis à grand frais par News Corp mais sans réel modèle économique. Surtout, cette brique applicative web manque partiellement à Microsoft qui a dû investir – mais petitement – dans Facebook, histoire d’être lié à un actif avant de se retrouvé distancé par de nouveaux acteurs. La nouvelle entité aurait donc fière allure.
Microsoft toujours favori
Au final le rachat de Yahoo par Microsoft semble inévitable aux yeux des analystes tant les supposés soutiens de Yahoo sont faibles ou impuissants à agir. Reste à connaître le montant du rachat, le montage qui sera finalement adopté et surtout les dégâts qu’auront causés ces semaines d’affrontement. Mais on peut parier sur une légère augmentation de l’offre de Microsoft qui serait payée par News Corp sous forme d’investissement minoritaire, puis sur un départ de Jerry Yang – qui pourrait se prévaloir d’avoir fait grimper l’offre; Vu l'état de ses relations avec Steve Ballmer, le fondateur du portail ne semble pas promis à une longue carrière chez Microsoft…
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