Moblin peut-il permettre à Linux de revenir sur les netbooks ?
Jusqu’à l’automne dernier, certains croyaient encore en la capacité de Linux à se maintenir sur les machines élaborées par les constructeurs de netbook. Après le ballon d’essai d’Asus avec son EeePC, les espoirs ont été vite douchés par l’agressivité de Microsoft. Lequel a réussi à ramener sur la voie de Windows l’essentiel de l’industrie. Un retour peut-être temporaire avec l’arrivée, en embuscade, d’Android et de Moblin.
Asus a lancé, début 2008 en France, son premier netbook, l’EeePC 700, avec Linux. Un couple qui a fait long feu : le constructeur est rapidement retourné à Windows, généralisant ce dernier sur ses gammes de portables low cost dès l’été 2008. Et tant pis pour ceux qui pensait que les ultra-portables à bas coût poussaient Linux : Windows XP à su s’y imposer, aidé notamment par l'gressivité tarifaire de Microsoft qui en cèderait la licence, pour ces produits, autour de 12 $.
Récemment, Henri Crohas, président et co-fondateur d’Archos, expliquait dans les colonnes du Point que, « un netbook, c’est un PC. Et, dans l’esprit des utilisateurs, un PC, c’est un processeur x86 et Windows. » Une barrière psychologique à laquelle certains ont déjà commencé à s'attaquer, comme Asus qui présentait récemment au Computex de Taipei un prototype de netbook sous Linux à base de processeur ARM, tout en indiquant que cette machine était encore loin d'être prête à voir le jour.
Acer, quant à lui, semble bien décidé à livrer des ultra-portables à bas coût équipés à la fois de Windows et d’Android. De quoi laisser le choix à l’utilisateur. Le choix d’une alternative que revendiquent aussi des supporters de l’initiative Moblin. Une initiative portée par Intel et à laquelle vient de se joindre récemment Novell.
Vincent Steehouse, ingénieur avant vente Novell, explique que l’éditeur de la distribution Linux SuSE a souhaité se joindre à l’initiative pour « contribuer au développement d’une distribution optimisée pour les netbooks ». Et de fustiger certaines initiatives comme celle d’Ubuntu : « aujourd’hui, il s’agit plus d’adaptation que d’optimisation. Les netbooks sont des appareils très grand public, avec des enjeux majeurs […] Gnome [un système de gestion d’interface graphique pour Linux, NDLR] est très bien, mais il n’est pas encore assez intuitif. » [Moblin s’appuie sur Gnome Mobile, une version spécialisée de Gnome, NDLR] Quant à Windows XP, « c’est toujours Windows… ».
Une question d’ergonomie plus que de prix
Pour Vincent Steehouse, dans la compétition entre Linux et Windows, « on a bien vu que le prix ne fait pas différence. C’est l’utilisateur qui décide selon ses usages et ses habitudes. » Du coup, « avec Moblin, l’idée est celle d’un changement brutal. On veut repenser l’interface graphique d’un système simple et léger à proposer aux OEM. » Des OEM qui construisent justement les PC que les constructeurs proposeront ensuite sur le marché : « on a besoin d’eux pour avoir Moblin pré-installé et mis en avant. »
Mais c’est bien l’ergonomie qui importe ici le plus : « on se situe à mi-chemin entre le PC et l’embarqué. On a besoin de proposer quelque chose de très simple et de très fonctionnel, tout en étant garant de sa fiabilité. » Et ce qui s’est fait jusque là ? « Ce n’était qu’un Linux auquel on avait ajouté un lanceur d’applications avec de grosses icônes. »
Répondre aux impératifs du support
Mais ce n’est pas tout. Avec Moblin, l'un des objectifs est aussi de faciliter le travail des constructeurs qui devront assurer le support technique, une tâche dont ils n’auraient pas réussi à s’acquitter avec les premiers netbooks sous Linux : « les hotlines n’étaient pas capables de résoudre les problèmes même les plus simples. Les constructeurs en ont donc conclu que le support de Linux est plus compliqué et lourd que celui de Windows. » A moins qu’il n’entraîne simplement un surcoût qu’ils se sont refusés à supporter…
Les supporters de Moblin entendent apporter une solution à ces difficultés. « Il y aura une interface très simple pour ajouter et supprimer des applications Moblin. Le site Web de Moblin propose déjà des guides de référence pour le développement d’applications intégrées à l’environnement graphique pour assurer la cohérence de l’expérience utilisateur. » Pour autant, aucun AppStore ni programme de certification ne semble prévu.
Un pari risqué
Reste que Microsoft ne restera bien sûr pas les bras croisés. Surtout avec un lancement de Windows 7 aux enjeux particulièrement importants. Pour Vincent Steehouse, « rien n’est joué. On démarche beaucoup de constructeurs et ils nous prêtent une oreille attentive. Trois ou quatre d’entre eux sont déjà bien moteurs et nous ont fourni leurs conditions techniques (types d’applications pré-installées, temps de démarrage, etc.). Pour le constructeur, l’intérêt est de proposer une nouveauté. » Et de retrouver une chance de se différencier quelque peu. Mais la pression sur les équipes impliquées dans Moblin semble importante : « nous devons être sûr que l’utilisateur ne sera pas déçu ; il faut que ce soit simple pour lui et que ça marche bien.