Tarifs de maintenance : les utilisateurs haussent le ton face à SAP
Des discussions qui traînent en longueur, quelques clients français entrés en résistance et qui ne paient plus leur facture de maintenance, des mesures préférentielles appliquées aux seuls clients allemands et autrichiens : SAP fait face à une fronde de ses utilisateurs. Et l’USF hausse le ton, exigeant un compromis rapide, des délais d’augmentation rallongés et une meilleure écoute des clients dans un contexte exceptionnel.
Mise à jour le 2 avril, à 17 heures.
L’USF – le club des utilisateurs français francophones – a décidé de hausser le ton dans le psychodrame de la hausse des tarifs de maintenance décidé par l’éditeur allemand en juillet dernier. Jean Leroux, président de l’organisation, demande instamment à SAP de revoir sa position et désire que les négociations, désormais engagées depuis plusieurs mois, débouchent enfin. « Nous ne comprendrions pas que dans les circonstances actuelles, SAP ne souhaite pas déboucher rapidement. Il est temps de rétablir une qualité de dialogue qui permette de rebondir sur des dossiers moins économiques et qui soulage les DSI pour qui la pression est incroyable en ce moment et qui comprennent mal le discours sur la création de valeur en période de crise ».
L’objectif n’est certes pas d’empêcher une augmentation que tout le monde semble admettre comme inéluctable, voire légitime au regard des tarifs appliqués par la concurrence et notamment Oracle. Mais tous les utilisateurs du monde – réunis au sein du SUGEN (SAP User Group Executive Network, un réseau de groupes utilisateurs) – estiment qu’il faut revoir le niveau annuel de la hausse et son étalement dans le temps « au-delà de l'échéance de 2012 prévue par l’éditeur ».
Dans un communiqué, l'USF réclame également l'alignement sur les conditions dont bénéficient les clients allemands et autrichiens "leur permettant de choisir entre le maintien du contrat standard (à un taux de 17 %) ou bien l’Enterprise Support (à un taux de 18,36 % et selon un délai à définir, de 22 %)". L'USF regrette que ce souhait, déjà exprimé par le SUGEN en octobre, n'ait toujours pas été entendu par l'éditeur. Partout dans le monde - l'Allemagne et l'Autriche exceptés donc -, les entreprises clientes n'ont pour l'instant d'autre choix que de passer à la nouvelle offre de maintenance (Enterprise Support). Ce qui s'accompagne d'une hausse de 8 % de la facture dès cette année. Les utilisateurs francophones ont en travers de la gorge cette stratégie du deux poids deux mesures et sont peu convaincus par les arguments juridiques avancés par l’éditeur pour expliquer ce cas particulier.
Des clients de plus en plus méfiants et qui ne règlent plus leurs factures
De fait, toujours selon Jean Leroux, « nous sommes en mars et les DSI en sont à leur cinquième budget pour l’année 2009. C’est très compliqué pour eux d’expliquer à leur direction générale une augmentation de 8% de la ligne maintenance de SAP alors qu’on les presse de baisser leur budget avec des taux à deux chiffres… ». Certains sont donc directement entrés en résistance et ont soit refusé de payer la dernière note, soit retranché les 8 % d’augmentation afin de revenir aux tarifs appliqués en 2008. Interrogé sur le sujet, Pascal Rialland avance qu'environ 90 % des factures de maintenance - sur la base du nouveau tarif donc - ont été réglées par les clients français. Ce qui serait dans la moyenne mondiale.
Il n'empêche. C'est bien un vent de révolution qui souffle au pays des échanges souvent feutrés entre clients et fournisseurs de PGI. Jean Leroux explique ainsi « avoir observé une radicalisation du discours des analystes et des utilisateurs autour de la relation avec les éditeurs. Les DSI sont de plus en plus décomplexés vis-à-vis de SAP et tendent l’oreille à ceux qui leur expliquent que les ajouts fonctionnels peuvent faire l’objet d’un étalonnage avec la concurrence. Cette évolution est finalement néfaste pour tout le monde. Les clients perdent confiance et c’est dommage ». D’autant plus que si l’annonce de l’augmentation se voulait globale, il s’avère que les clubs utilisateurs allemand et autrichien ont pu avoir un « aménagement de peine ». Les utilisateurs francophones ont en travers de la gorge cette stratégie du deux poids deux mesures et sont peu convaincus par les arguments juridiques avancés par l’éditeur pour expliquer cette différenciation des cas.
Des négociations qui tardent à déboucher sur le compromis attendu
Du côté de SAP, on semble donc prendre au sérieux cette fronde et la tendance est à l’apaisement puisque, selon l’USF, aucune mesure de rétorsion face au non paiement n’a été prise par l’éditeur. Un signal d'un assouplissement à venir de la position de l’Allemand ? Le début de la grogne avait déjà conduit ce dernier à accepter l’idée de la mise en place d’indicateurs de suivi de ses services de maintenance. Une réelle innovation qui tarde cependant à se concrétiser. Jean Leroux estime « qu’il faudra encore du temps vu que la démarche est innovante. Nous continuons de discuter et les premiers éléments pourraient apparaître à l’automne, mais difficilement avant. Tout n’est pas encore acté. Pour ma part, je pousse toujours l’idée d’intégrer un indicateur lié au langage utilisé par le support. Nous souhaitons imposer que, au moins durant les heures ouvrées, les entreprises puissent avoir des interlocuteurs francophones pour le support de niveau 1 ».
Mis au courant du coup de gueule matinal de l’USF, Pascal Rialland – patron de SAP en France – ne s’y est pas trompé. Et a tenu à avoir une conversation avec Jean Leroux ce matin même. Rien n’a filtré mais il semble que le président de l’USF en soit ressorti quelque peu réconforté sur les chances d’obtenir un compromis. Jean Leroux déclare toutefois demeurer prudent et se dit « modérément optimiste même si les choses avancent et que nous tenons bon ». D’autant mieux que le club s’est organisé juridiquement et a mandaté un cabinet d’avocat spécialisé pour accompagner les adhérents. Selon Jean Leroux, « il s’agit d’un véritable service juridique que les membres de l’USF peuvent consulter via le wiki du club. Nous souhaitons apporter de la valeur en conseil pour nos membres, mais nous n’entrerons pas en conflit au nom du groupe avec SAP ». Une position qui combine donc le durcissement du ton, avec le souci de demeurer un interlocuteur positif susceptible d’améliorer le dialogue et d’arriver au compromis attendu. Reste que l’épreuve de force engagée – si l’USF et le SUGEN obtiennent gain de cause - pourrait permettre un réel rééquilibrage des forces dans la relation clients/fournisseurs dans le monde des progiciels. Une vraie nouveauté.
En complément : écouter la réaction de Jim Hageman Snabe, membre du conseil d'administration de SAP, au coup de gueule des utilisateurs français (en anglais).
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